Situation réelle

“Alice démissionne.” Première réaction : panique, sentiment d’échec, culpabilité. Puis parfois : colère, sentiment de trahison. Ces émotions sont humaines mais ne doivent pas dicter la réponse.

Ce que j’ai observé : un départ bien géré peut renforcer la culture. Un départ mal géré peut détruire la confiance de ceux qui restent.

Le faux problème

Le faux problème serait de croire qu’un départ est toujours un échec. En réalité, les gens évoluent, changent de trajectoire, et c’est normal. Certains départs sont même sains.

Un autre faux problème : prendre le départ personnellement. En réalité, les raisons sont souvent multiples et la personne a le droit de choisir sa trajectoire.

Le vrai enjeu CTO

Le vrai enjeu est de gérer la transition avec lucidité et respect pour toutes les parties :

Les 4 types de départs :

Type 1 - Départ évolution (positif) : Contexte : personne a grandi, veut challenge différent ailleurs. Signes : annonce transparente, préavis respecté, volonté d’aider transition. Réponse appropriée : célébrer parcours, faciliter transition, maintenir relation. Erreur à éviter : culpabiliser ou retenir artificiellement.

Type 2 - Départ insatisfaction (signal) : Contexte : problème non résolu (culture, management, trajectoire). Signes : frustration visible avant annonce, exit interview révélateur. Réponse appropriée : écouter vraiment, apprendre, corriger pour futurs. Erreur à éviter : nier les problèmes ou blâmer la personne.

Type 3 - Départ opportunité externe (neutre) : Contexte : opportunité significative ailleurs (salaire, rôle, localisation). Signes : annonce factuelle, pas de grief particulier. Réponse appropriée : comprendre, contre-offre si justifié, sinon faciliter. Erreur à éviter : contre-offre automatique qui crée précédent.

Type 4 - Départ nécessaire (sain) : Contexte : mauvais fit personne-rôle ou personne-culture. Signes : performance insuffisante ou comportement toxique. Réponse appropriée : séparation respectueuse, package correct. Erreur à éviter : prolonger situation toxique.

Les 3 phases de gestion d’un départ :

Phase 1 - L’annonce (J0) : Réaction : écouter calmement, comprendre raisons, remercier pour transparence. Émotions : reconnaître déception mais pas culpabiliser. Immédiat : discuter préavis, transition, communication équipe. Piège : réaction émotionnelle (colère, culpabilisation, contre-offre désespérée).

Phase 2 - La transition (préavis) : Documentation : connaissance critique transférée, code documenté. Formation : backup formé sur responsabilités clés. Communication : équipe informée avec respect, plan transition partagé. Relation : maintenir professionnalisme et respect mutuel. Piège : mise au placard, fuite de connaissance, toxicité.

Phase 3 - L’après (post-départ) : Exit interview : comprendre vraies raisons, apprendre pour futurs. Analyse : pattern si multiples départs, correction si besoin. Relation : maintenir porte ouverte, recommandations honnêtes. Alumni : réseau d’anciens peut être atout (recrutement, business). Piège : brûler les ponts, ne rien apprendre.

Cadre de décision

Voici comment je gère les départs :

1. Réaction initiale calme Respirer. Pas de réaction émotionnelle. Écouter, comprendre, remercier transparence. Cette maturité donne ton.

2. Décider : retenir ou faciliter Questions : problème réel et adressable ? Contre-offre change vraiment quelque chose ? Ou départ inévitable/sain ? Cette lucidité évite erreurs.

3. Plan transition structuré Checklist : documentation, formation backup, communication équipe, passation projets. Ce plan évite chaos.

4. Exit interview honnête Questions vraies : “Qu’est-ce qui t’a fait partir vraiment ? Qu’est-ce qu’on aurait pu faire différemment ?” Cette écoute permet apprentissage.

5. Analyse pattern si répété Si 3+ départs même raison en 6 mois : problème systémique. Action corrective obligatoire. Cette lucidité évite hémorragie.

Retour terrain

Ce que j’ai observé dans différentes situations :

Le départ toxique : Alice démissionne. Manager réaction : colère, culpabilisation, mise au placard pendant préavis. Résultat : équipe choquée, culture de peur, 2 départs supplémentaires dans le mois.

Le départ bien géré : Bob annonce départ. CTO : “Merci pour ces 3 ans, je comprends, comment on fait une belle transition ?” 1 mois préavis bien utilisé : doc complète, 2 backups formés, équipe informée avec respect. Départ en all-hands avec célébration. Résultat : équipe rassurée, Bob recommande boîte, revient 2 ans plus tard.

L’exemple de l’exit interview : 3 départs en 4 mois, motif similaire : “Pas d’évolution possible.” Exit interviews révèlent : grille de progression floue, pas de plan carrière. Actions : création framework carrière, discussion évolution trimestrielle. Résultat : départs s’arrêtent, rétention améliore.

Le pattern ignoré : 5 départs en 6 mois, tous citent même manager toxique. RH et CTO ignorent pattern. Résultat : 3 départs supplémentaires, équipe détruite, manager finalement séparé (trop tard).

Erreurs fréquentes

Réaction émotionnelle Colère, culpabilisation, panique visible. Résultat : relation détruite, équipe apeurée.

Contre-offre automatique Monter salaire sans adresser vraie raison. Résultat : personne part 6 mois plus tard quand même, précédent créé.

Mise au placard pendant préavis Isoler, retirer responsabilités. Résultat : perte de connaissance, message toxique à équipe.

Ne rien apprendre Pas d’exit interview ou ignorer feedback. Résultat : mêmes erreurs répétées.

Si c’était à refaire

Avec le recul, voici ce que je ferais différemment :

Réaction calibrée systématique Face à démission : respirer, écouter, comprendre, remercier. Cette maturité évite escalade.

Exit interview structuré obligatoire Template questions, conversation honnête, notes partagées avec RH. Cet apprentissage évite répétition.

Analyse pattern trimestrielle Review tous départs : raisons, patterns ? Si 2+ même raison, action corrective. Cette vigilance détecte problèmes.

Préavis utile et respectueux Plan transition clair, responsabilités maintenues, départ célébré. Ce respect rassure restants et maintient relation.

Pour approfondir

Le livre "Être ou ne pas être CTO" explore comment créer une culture où les départs sont gérés avec maturité.

Pour approfondir, tu peux aussi consulter l’article "Gérer les non-performances" ou les autres contenus du pilier "Culture & management".