Situation réelle

“L’équilibre pro-perso est important ici.” Puis : Slack à 23h du manager. Valorisation de qui fait 60h/semaine. Culpabilisation de qui part à 18h. L’écart entre discours et réalité détruit la crédibilité.

Ce que j’ai observé : l’équilibre se mesure aux comportements réels, pas aux valeurs affichées. Ce que le leadership fait compte plus que ce qu’il dit.

Le faux problème

Le faux problème serait de croire qu’il suffit d’afficher la valeur. En réalité, sans incarnation par le leadership et sans garde-fous structurels, ça reste cosmétique.

Un autre faux problème : penser que l’équilibre = 35h/semaine strictes. En réalité, c’est la soutenabilité sur la durée, pas un chiffre magique identique pour tous.

Le vrai enjeu CTO

Le vrai enjeu est de créer les conditions réelles de l’équilibre, pas juste en parler :

Les 4 signes d’hypocrisie sur l’équilibre :

Hypocrisie 1 - Dire/Faire contradictoire : Discours : “Prenez soin de vous, déconnectez.” Comportement : manager envoie Slack 22h-23h, weekend. Résultat : message reçu = “l’équilibre, c’est pour les autres.” Impact : personne n’ose vraiment déconnecter, culture toxique.

Hypocrisie 2 - Valoriser le surmenage : Discours : “L’équilibre est important.” Comportement : promouvoir/célébrer qui fait 60h, commenter “dédication” de qui répond 23h. Résultat : course au surmenage pour être reconnu. Impact : burn-out normalisé.

Hypocrisie 3 - Charge impossible sans ressources : Discours : “Gardez équilibre.” Comportement : roadmap impossible en 40h, pas d’embauche, deadlines irréalistes. Résultat : équilibre structurellement impossible. Impact : cynisme, burn-out.

Hypocrisie 4 - Culpabiliser la déconnexion : Discours : “Déconnectez le soir.” Comportement : commentaires passifs-agressifs sur qui part 18h, réunions 18h30. Résultat : culpabilité de respecter équilibre. Impact : présentéisme, inefficacité.

Les 5 leviers pour rendre l’équilibre réel :

Levier 1 - Leadership modélise : CTO et managers : horaires raisonnables visibles, vacances prises complètement, pas de Slack soir/weekend (ou différé). Impact : permission tacite pour équipe de faire pareil. Message : “C’est OK de déconnecter.”

Levier 2 - Mesurer et intervenir : Tracker heures réelles (auto-déclaré ou estimé). Si >45h pendant >3 semaines : conversation obligatoire. Impact : détection surcharge avant burn-out. Message : “On surveille et on agit.”

Levier 3 - Valoriser efficacité, pas heures : Célébrer qui livre en 35h bien organisées. Arrêter de célébrer héros 70h. Impact : change incitations, culture plus saine. Message : “Résultat compte, pas heures.”

Levier 4 - Roadmap soutenable : Planifier avec marge, embaucher si nécessaire, dire non aux deadlines impossibles. Impact : équilibre structurellement possible. Message : “On dimensionne charge correctement.”

Levier 5 - Vacances forcées : Minimum 3 semaines/an obligatoires, déconnexion réelle (pas de Slack/email). Impact : récupération effective, soutenabilité long terme. Message : “Repos est non-négociable.”

Cadre de décision

Voici comment je rends l’équilibre réel :

1. Auto-audit leadership Questions : à quelle heure j’envoie mon dernier Slack ? Combien d’heures je fais ? Quand ai-je pris vraies vacances ? Cette lucidité évite hypocrisie.

2. Tracker heures équipe Question one-on-one : “Combien d’heures cette semaine ?” Si >45h : “Pourquoi ? Qu’est-ce qu’on change ?” Cette attention détecte surcharge.

3. Politique communication Règle explicite : pas de Slack/email 20h-8h sauf urgence vraie (prod down). Utiliser “send later” si travail soir. Cette limite protège déconnexion.

4. Revue roadmap soutenabilité Trimestre : roadmap faisable en 40h/semaine ? Si non, réduire scope ou embaucher. Cette discipline évite surcharge structurelle.

5. Mesurer satisfaction équilibre Survey trimestriel : “Équilibre pro-perso 1-10 ?” Si <6, actions correctives. Cette mesure force lucidité.

Retour terrain

Ce que j’ai observé dans différentes organisations :

L’hypocrisie toxique : Affichage “équilibre important”. Réalité : CTO Slack 23h, roadmap pour 60h/semaine, valorisation surmenage. Résultat : 40% turnover/an, burn-outs répétés, culture toxique.

La cohérence qui retient : CTO modélise : part 18h visible, vacances 4 semaines/an déconnecté, pas de Slack soir. Roadmap dimensionnée pour 40h. Célébration efficacité pas heures. Résultat : turnover <10%, satisfaction élevée, performance durable.

L’exemple de la modélisation : CTO all-hands : “Je pars 18h, je déconnecte weekend, j’attends pareil de vous. Si je vous envoie Slack soir, c’est différé, ne répondez pas.” Cette clarté donne permission.

L’intervention sur surcharge : One-on-one révèle 55h/semaine depuis 4 semaines. Manager : “C’est insoutenable. Qu’est-ce qu’on arrête ou à qui on délègue ?” Réorganisation immédiate. Résultat : retour 42h, burn-out évité.

Erreurs fréquentes

Afficher sans incarner Valeur affichée mais leadership fait 60h et Slack 23h. Résultat : cynisme, culture du surmenage.

Valoriser les heures Promouvoir/célébrer qui fait 60h. Résultat : course au surmenage, équilibre impossible.

Roadmap déconnectée de la capacité Planifier pour 60h mais dire “gardez équilibre”. Résultat : contradiction structurelle.

Ne jamais mesurer Supposer que équilibre est OK. Résultat : détection tardive lors burn-outs/départs.

Si c’était à refaire

Avec le recul, voici ce que je ferais différemment :

Modéliser dès le premier jour CTO horaires raisonnables visibles, vacances complètes, pas de Slack soir. Cette modélisation initiale pose culture.

Tracker heures et intervenir Question systématique one-on-one : “Heures cette semaine ?” Si >45h, action immédiate. Cette vigilance prévient burn-out.

Politique communication explicite Document : pas de Slack 20h-8h sauf urgence. Utiliser “send later”. Cette règle protège déconnexion.

Célébrer efficacité pas heures All-hands valoriser qui livre bien en 35h. Arrêter célébrer héros surmenés. Ce message change incitations.

Pour approfondir

Le livre "Être ou ne pas être CTO" explore comment créer une culture soutenable sur la durée.

Pour approfondir, tu peux aussi consulter l’article "Signaux de burn-out" ou les autres contenus du pilier "Culture & management".