Situation réelle
“On va devenir une entreprise libérée, plus de hiérarchie !” Cette annonce enthousiaste cache souvent une incompréhension de ce que ça implique réellement. Résultat : chaos, frustration, retour en arrière.
Ce que j’ai observé : l’entreprise libérée n’est ni une utopie ni une arnaque. C’est un modèle exigeant qui fonctionne dans certains contextes et échoue dans d’autres.
Le faux problème
Le faux problème serait de croire que “libéré” = pas de structure. En réalité, les organisations libérées ont souvent PLUS de structure et processus que les organisations traditionnelles.
Un autre faux problème : penser que c’est pour tout le monde. En réalité, ça demande un niveau de maturité individuelle et collective élevé.
Le vrai enjeu CTO
Le vrai enjeu est de comprendre ce qui marche, ce qui ne marche pas, et dans quels contextes :
Ce qu’est vraiment l’entreprise libérée :
PAS : Pas de hiérarchie, chaos organisé, tout le monde décide tout, pas d’accountability.
MAIS : Structure décisionnelle distribuée, accountability claire, processus explicites, leadership par compétence pas par titre.
Les 3 modèles principaux :
Modèle 1 - Holacracie : Structure : organisation en cercles, rôles explicites, process gouvernance formel. Décision : par rôle, pas par personne ou vote. Effort required : très élevé (réunions gouvernance, rôles à maintenir). Contexte qui marche : 20-150 personnes, culture mature, volonté forte leadership.
Modèle 2 - Entreprise libérée (Zobrist style) : Structure : peu de managers, équipes auto-organisées, règles minimales. Décision : équipes décident dans cadre clair. Effort : moyen (moins formel qu’holacracie). Contexte : culture forte préexistante, leadership charismatique, patience (transition 3-5 ans).
Modèle 3 - Hybrid distribué : Structure : hiérarchie légère, autonomie équipes dans cadre. Décision : framework Type 1/Type 2, délégation large. Effort : faible à moyen. Contexte : plus facile à implémenter, scalable.
Ce qui marche :
- Autonomie équipes dans cadre clair (pas autonomie totale)
- Décisions décentralisées avec guardrails
- Accountability explicite (qui porte quoi)
- Processus décision documentés
Ce qui ne marche pas :
- Supprimer hiérarchie sans structure alternative
- “Décidez entre vous” sans framework
- Consensus obligatoire sur tout
- Pas d’escalation possible
Cadre de décision
Voici comment j’évalue si ça fait sens :
1. Auto-évaluation maturité Questions : équipe capable décisions complexes ? Culture feedback forte ? Confiance élevée ? Si 3× oui, envisageable. Si 2× non, prématuré.
2. Commencer petit et progressif Pas “big bang libération”. Commencer par 1 équipe pilote, 6 mois, apprendre, ajuster, étendre si succès.
3. Framework décision clair Définir AVANT : qui décide quoi, comment escalader, accountability. Sans ça, chaos garanti.
4. Mesurer impact Avant/après : vélocité, satisfaction équipe, qualité décisions, turnover. Ces données objectives guident.
5. Accepter que ce n’est pas pour tous Certaines personnes préfèrent structure claire et directive. C’est OK. Forcer = échec.
Retour terrain
Ce que j’ai observé dans différentes tentatives :
L’échec big bang : “À partir de demain, plus de managers, vous décidez.” Résultat : chaos, paralysie, conflits, retour hiérarchie 6 mois plus tard.
Le succès progressif : Une équipe pilote, framework décision Type 1/Type 2, 6 mois test. Succès → extension progressive. 2 ans : 5 équipes auto-organisées, managers deviennent facilitateurs.
L’holacracie qui pèse : Adoption holacracie complète. 15h/mois réunions gouvernance, complexité processus. Résultat : équipe épuisée par process, retour modèle plus simple.
Le hybrid qui marche : Autonomie large (Type 2 décisions), hiérarchie légère (CTO + Tech Leads), framework clair. Résultat : vélocité haute, satisfaction élevée, scalable.
Erreurs fréquentes
Big bang sans préparation “Demain on est libérés !” Résultat : chaos, absence de structure alternative.
Copier un modèle sans adaptation Appliquer holacracie “by the book” sans adapter au contexte. Résultat : rigidité, frustration.
Pas de framework décision “Décidez entre vous.” Résultat : paralysie ou anarchie selon personnalités.
Forcer tout le monde Imposer auto-organisation à qui préfère structure claire. Résultat : frustration, départs.
Si c’était à refaire
Avec le recul, voici ce que je ferais différemment :
Commencer par autonomie équipes, pas “libération” Framework Type 1/Type 2, délégation large. Tester 12 mois. Si succès, aller plus loin.
Pilote avec équipe volontaire Pas imposer. Équipe qui veut tester, 6 mois, mesurer, apprendre. Cette approche réduit risque.
Framework décision AVANT autonomie Définir qui décide quoi, comment escalader. Sans ça, l’autonomie devient chaos.
Accepter le hybrid comme viable Pas besoin de “vraie” entreprise libérée. Autonomie large + hiérarchie légère fonctionne souvent mieux.
Pour approfondir
Le livre “Être ou ne pas être CTO” explore différents modèles d’organisation et leurs résultats réels.
Pour approfondir, tu peux aussi consulter l’article “Autonomie des équipes” ou les autres contenus du pilier “Culture & management”.