Situation réelle
Jeff Bezos a popularisé le concept : Type 1 decisions (irréversibles, portes à sens unique) vs Type 2 decisions (réversibles, portes à double sens). Cette distinction change radicalement comment on décide.
Ce que j’ai observé : traiter toutes les décisions comme irréversibles ralentit l’organisation. Traiter toutes les décisions comme réversibles crée des erreurs coûteuses. Distinguer les deux est crucial.
Le faux problème
Le faux problème serait de croire que la plupart des décisions sont irréversibles. En réalité, 80-90% des décisions tech sont réversibles. On les traite juste comme irréversibles par peur.
Un autre faux problème : penser que “réversible” signifie “gratuit à inverser”. En réalité, même les décisions réversibles ont un coût d’inversion. L’enjeu est de savoir si ce coût est acceptable.
Le vrai enjeu CTO
Le vrai enjeu est de classifier correctement chaque décision et d’adapter le processus :
Décisions Type 1 (irréversibles ou très coûteuses à inverser) :
Caractéristiques : Coût d’inversion >3 mois de travail, Impact sur architecture globale, Crée des dépendances fortes, Exemples : choix cloud provider, langage core, architecture monolithe→microservices, base de données principale.
Processus adapté : Analyse approfondie (1-4 semaines), Consultation large (équipe + experts), POC/spike si nécessaire, Documentation extensive (ADR), Validation CTO obligatoire.
Décisions Type 2 (réversibles à coût acceptable) :
Caractéristiques : Coût d’inversion <1 semaine, Impact limité à une équipe/feature, Pas de dépendances fortes, Exemples : framework UI pour une feature, librairie utilitaire, structure de code, process équipe.
Processus adapté : Décision rapide (heures/jours), Consultation limitée (équipe directe), Pas de POC nécessaire, Documentation minimale, Délégation possible.
Le test de réversibilité : 3 questions pour classifier :
- Combien de temps pour revenir en arrière ? (<1 semaine = Type 2)
- Combien d’équipes impactées ? (>2 équipes = Type 1)
- Crée-t-on des dépendances fortes ? (oui = Type 1)
Cadre de décision
Voici comment j’applique ce framework :
1. Classifier avant de décider Première étape : est-ce Type 1 ou Type 2 ? Ne pas commencer à analyser avant de savoir.
2. Adapter le processus selon le type Type 1 : processus lourd justifié (1-4 semaines). Type 2 : processus léger (24-72h max). Cette différence multiplie la vélocité.
3. Document the classification Dans l’ADR ou doc décision : “Classifié Type 2 car réversible en 3 jours”. Cette justification évite les débats futurs.
4. Règle de delegation Type 2 : délégation large possible. Type 1 : CTO doit valider. Cette règle claire évite les blocages.
5. Accepter les erreurs Type 2 Une décision Type 2 qui s’avère mauvaise ? On inverse rapidement. Le coût est acceptable. Ne pas punir, apprendre.
Retour terrain
Ce que j’ai observé dans différentes organisations :
Tout traiter en Type 1 : Chaque décision passe par validation CTO, analyse de 2 semaines, POC. Résultat : paralysie, vélocité divisée par 5, talents frustrés qui partent.
Tout traiter en Type 2 : “Tentez, on verra.” Résultat : migration cloud lancée sans analyse (Type 1 traité en Type 2), échec coûteux, 6 mois perdus.
La distinction qui accélère : Type 2 décidées en 48h par l’équipe. Type 1 analysées 2-4 semaines avec CTO. Résultat : 85% décisions en Type 2, vélocité ×3, qualité Type 1 maintenue.
L’erreur Type 2 bien gérée : Framework UI choisi (Type 2), s’avère mauvais après 2 semaines. Changé en 3 jours. Coût : 2 semaines de travail. Acceptable. Apprentissage : quels critères pour le prochain choix.
Erreurs fréquentes
Classifier en Type 1 par défaut “Dans le doute, on analyse à fond.” Résultat : paralysie, analyse de 2 semaines pour décisions réversibles.
Sous-estimer l’irréversibilité Traiter migration cloud (Type 1) comme changement de librairie (Type 2). Résultat : décision précipitée, lock-in coûteux.
Ne pas documenter la classification Décider sans dire “c’est Type 1 ou 2”. Résultat : incohérence processus, débats sur “pourquoi cette décision a pris 2 semaines vs celle-là 2 jours”.
Punir les erreurs Type 2 Blâmer quelqu’un pour une décision Type 2 qui s’avère mauvaise. Résultat : personne n’ose plus décider, retour à la paralysie.
Si c’était à refaire
Avec le recul, voici ce que je ferais différemment :
Former l’équipe au framework Workshop d'1h sur Type 1 vs Type 2 avec exemples concrets. Cette formation permet à l’équipe de classifier correctement.
Créer une liste de référence Document partagé listant décisions classiques avec leur type. “Migration cloud = Type 1”, “Choix librairie util = Type 2”. Cette référence évite les débats.
Documenter la classification systématiquement Dans chaque décision : “Type 2 car réversible en X jours avec coût Y”. Cette transparence justifie le processus.
Célébrer les inversions Type 2 Mettre en avant les décisions Type 2 inversées rapidement. “On a essayé X, ça ne marchait pas, on est revenus à Y en 2 jours. Good.” Cette culture encourage l’expérimentation.
Pour approfondir
Le livre “Être ou ne pas être CTO” explore ce framework avec des exemples concrets de classifications correctes et incorrectes.
Pour approfondir, tu peux aussi consulter l’article “Build vs Buy vs Partner” ou les autres contenus du pilier “Gouvernance & décision”.